Qui mieux qu’un astronaute expérimenté pour décrire le vol en Soyouz ? L’astronaute française de l’ESA Claudie Haigneré a voyagé en Soyouz à deux reprises, en 1996 et 2001. Pour sa seconde mission, Andromède,  elle a d’ailleurs passé deux jours dans le vaisseau, suivant la même procédure que Thomas en ce moment même. Elle avait transmis le texte suivant à l’Agence spatiale européenne l’an dernier à l’occasion du vol d’Andreas Mogensen, dont Thomas était la doublure. Voici ses impressions sur ce vol hors du commun :

 
« Premier vol, enfin la mise en orbite ! Premières heures d’un voyage si longuement rêvé, d’une mission si précisément préparée. Après des années d’entraînement, après des heures de simulations, on a l’impression d’être prêts. Les équipes scientifiques et techniques, les instructeurs, les cosmonautes expérimentés nous ont tout transmis de leur expérience et de leurs recommandations. La responsabilité est lourde, objectif : réussite à 100% de la mission, astronaute professionnel de l’ESA, oui…

Claudie in Soyuz during Andromède mission in 2001. Credits: ESA/CNES

Claudie dans le Soyouz pour sa mission Andromède (2001). Photo : ESA/CNES

Oui… Mais aussi… le pur bonheur de la découverte de ce que l’on n’avait pas imaginé, pas espéré même. Et ces quelques heures après la mise en orbite, où l’on a un peu de temps pour soi. Découvrir son corps en microgravité, l’absence de poids, la lenteur et la maladresse à apprivoiser. Découvrir le spectacle par le hublot : le défilement de la terre, le passage du jour à la nuit sur Terre, le cosmos noir et ses millions d’étoiles. C’est encore plus beau et plus intense que tout ce à quoi on avait rêvé. Un pur moment de vrai bonheur, de joie profonde. Laisser s’imprimer à jamais toutes ces sensations pour pouvoir ensuite les partager avec tous les autres explorateurs restés au sol. Garder son âme d’enfant passionné, impatient et curieux. Aiguiser son regard. Aimer se laisser surprendre… et cela va très vite arriver : une aurore australe, le lent voyage et l’arrivée majestueuse du Soyouz pour l’amarrage à la station, l’ouverture de l’écoutille, la joie des retrouvailles avec l’équipage à bord, la surprenante découverte de l’ISS immense. Chaque mission est unique, mais elle ne nous appartient pas complétement. Quelques heures indélébiles qui n’avaient pas été décrites dans les procédures de vol… et que chacun au sol nous envie !
Puis les procédures, le déroulement de la mission, le programme scientifique, retour à la réalité. Prêts ? Oui, encore plus que ce que l’on savait. »