Training at Johnson Space Centre, USA, pour une sortie extravéhiculaire. Photo : ESA – S. Corvaja

Session d’entraînement au Johnson Space Centre (États-Unis). Photo : ESA – S. Corvaja

Mon départ est très proche maintenant. Je vivrai bientôt à 400 km au-dessus de la Terre, suspendu dans le vide spatial. Ce vide d’où, de plus en plus souvent, surgit un nouveau danger : les débris spatiaux. Si un débris percute l’ISS, notre mission est terminée. Au mieux, nous avons le temps d’entrer à bord du Soyouz et de retourner sur Terre.

Je me suis entraîné pendant sept ans pour cette mission de six mois à bord de l’ISS. Pendant mon entraînement, j’ai appris à gérer des scénarios catastrophe. C’est ainsi que j’ai découvert la nouvelle menace des débris spatiaux. En effet, les trois scénarios catastrophe principaux sont : feu, toxicité et dépressurisation. L’une des causes probables de cette dernière serait un trou dans la carlingue de l’ISS, généralement causé par un débris.

Chip in the International Space Station's Cupola observatory caused by space debris. Credits: ESA/NASA

Impact sur la coupole d’observation panoramique Cupola de la Station spatiale internationale. Photo : ESA/NASA

Bien sûr, tous les débris ne risquent pas de pénétrer la carlingue de l’ISS. Celle-ci est protégée par un blindage capable de résister à des débris mesurant jusqu’à 1 cm.

Les débris les plus gros sont surveillés depuis la Terre. Ainsi leurs orbites sont connues et en cas de suspicion de collision, les ingénieurs peuvent modifier l’orbite de l’ISS afin d’éviter une collision.

Aujourd’hui, l’ISS manœuvre pour éviter un débris 4 à 5 fois par an. Les risques associés aux débris sont croissants. Mais ceci ne pose pas un problème seulement pour l’ISS.

Il y a eu plus de 6000 lancements jusqu’à aujourd’hui. Des fusées, satellites, navettes spatiales, stations spatiales dorment maintenant dans l’espace. Au début de la conquête spatiale, personne n’avait conscience du problème que ces bijoux technologiques allaient engendrer.

Tout ça fait un peu honte, car l’espace était un milieu pur et nous les êtres humains sommes venus le salir.

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Distribution des débris spatiaux. Image : ESA

Ce sont 29000 objets de 10 cm à plusieurs mètres de long qui errent au-dessus de nos têtes. Ces débris sont un casse-tête chinois pour nos ingénieurs et opérateurs. En effet, ils peuvent à tout moment percuter des satellites opérationnels.

Nous, la communauté spatiale, devons mener une réflexion responsable sur la manière de gérer les conséquences de nos activités. Cette réflexion, nous devons l’avoir en regardant le ciel bien sûr, mais aussi, et surtout, la Terre et les hommes qu’elle porte, car nous sommes tous concernés dans nos villes et nos campagnes. Nous bénéficions tous des activités spatiales. Il est temps que nous fassions face aux conséquences de nos actions et tentions de nettoyer les orbites polluées.

Si on ne fait rien maintenant, il sera trop tard dans 30 ans. Les orbites seront trop polluées. C’est comme pour le changement climatique. Nous devons agir maintenant. Nous ne pouvons pas attendre qu’il soit trop tard pour ça.

Les satellites du futur devront prendre en compte la réalité des débris spatiaux. Il faut donc changer radicalement les regards sur la façon de concevoir les engins spatiaux, afin qu’on ne soit plus obligé de les éviter une fois qu’ils sont hors d’usage. Je crois profondément qu’à long terme, l’avenir est là, dans cette évolution des mentalités. Et croyez-moi, elle est en train de se faire.

L’ESA a lancé l’initiative Clean Space en 2012. Ils travaillent sur le développement des technologies pour réduire les débris présents et éviter d’en produire de nouveaux. J’ai beaucoup de plaisir à travailler avec Clean Space et je continuerai à promouvoir leurs activités.