Ce vendredi 24 mars, Shane Kimbrough et Thomas Pesquet effectueront une nouvelle sortie dans l’espace ensemble, après celle du 13 janvier. C’est la première d’une série de trois activités extravéhiculaires qui auront lieu dans les semaines à venir. L’astronaute de la NASA Peggy Whitson épaulera ainsi son compatriote, avant de sortir à nouveau dans l’espace en compagnie de Thomas début avril 2017.

Shane et Thomas passeront près de sept heures à l’extérieur de la Station spatiale pour déconnecter des câbles de l’adaptateur de couplage pressurisé 3 (PMA-3), lubrifier l’extrémité du bras robotique Canardarm2, inspecter un radiateur et remplacer des caméras et des équipements informatiques (contenant notamment un logiciel actualisé destiné aux opérations d’amarrage pour des vols commerciaux).

Les travaux sur le PMA-3 prépareront son transfert qui devrait avoir lieu par bras robotique le 26 mars 2017. Il sera alors déplacé vers le module Harmony, permettant ainsi de libérer le port de Tranquility en vue de l’installation d’un nouvel adaptateur d’amarrage international. Ce dernier figurera dans la cargaison d’un véhicule ravitailleur qui devrait arriver prochainement à la Station spatiale.

L’intégralité de la sortie extravéhiculaire (préparatifs compris) est à suivre en direct ici à partir de 11h30 CET (heure de Paris).

Thomas in the spacesuit without stripes during his first spacewalk. Credits: Roscosmos

Thomas en scaphandre durant sa première sortie dans l’espace (13/01/2017). Photo : Roscosmos

L’activité extravéhiculaire en détail

Dès sept heures du matin (heure de Paris), Thomas et Shane commenceront à respirer de l’oxygène pur pour purger le corps de son azote. La pression à l’intérieur des scaphandres est plus basse que dans la Station spatiale. Sans une étape de pré-respiration, les astronautes seraient sujets comme les plongeurs à la maladie des caissons : à cause de changements de pression soudain, l’azote du corps humain peut former des bulles dans le sang et les tissus de l’organisme et provoquer des vertiges, voir mettre en péril la vie des astronautes.

Peggy aidera alors Shane et Thomas à revêtir leur scaphandre.

Space Station structure. Credits: Wikimedia

Structure de la Station spatiale internationale. Source : Wikimedia

Les deux astronautes passeront l’intégralité de leur sortie à travailler chacun de leur côté sur des tâches indépendantes. Shane commencera par rejoindre le segment central S0 de la poutre de la Station pour y installer le nouveau multiplexeur-démultiplexeur EPIC (Enhanced Processor & Integrated Communications). Thomas, de son côté, se déplacera vers la section S1 pour y inspecter une légère fuite du système de refroidissement de la Station.

Comme les deux astronautes passeront l’ensemble de la sortie à travailler sur des segments différents, ils n’auront pas l’occasion de procéder aux traditionnels buddy-checks, c’est-à-dire la vérification réciproque et régulière des équipements et des scaphandres. En cas d’urgence, cette action peut se révéler essentielle. Une attention particulière a donc été accordée au programme des deux astronautes et aux situations auxquelles ils pourraient avoir à faire face.

L’après-midi de Shane

Moving the pressurised mating adapter in 2009. Credits: NASA

Opérations robotiques sur l’adaptateur de couplage pressurisé en 2009. Photo : NASA

La première tâche de Shane consistera donc à remplacer les circuits multiplexeur-démultiplexeur (MDM) EPIC. Ces ordinateurs contrôlent tous les aspects des systèmes informatiques de la Station. Cette opération devrait durer environ 90 minutes.

Shane pourra alors rejoindre le module Node-3 où se trouve l’adaptateur de couplage pressurisé 3 (PMA-3). Il s’agit d’un adaptateur d’amarrage pour les véhicules visiteurs. Shane devra le détacher pour que le bras robotique puisse l’attraper et le transférer sur un autre segment de la Station. Entre les câbles à débrancher, les embouts à ajouter à ces derniers et les boulons à desserrer, cette tâche devrait occuper l’astronaute de la NASA pendant 75 minutes. Shane retournera ensuite au sas pour changer son équipement.

La dernière tâche au programme de l’Américain consistera à récupérer deux unités de caméra extérieure situées sur le laboratoire japonais Kibo. Leurs lumières doivent être remplacées, mais cette opération ne peut se faire qu’à l’intérieur de la Station. Shane devra donc desserrer les deux boulons de chaque appareil pour les rapporter dans le sas.

L’après-midi de Thomas

À sa sortie du sas, Thomas rejoindra la section P1 de la poutre pour y inspecter un radiateur. La légère fuite d’ammoniaque repérée depuis plusieurs années ne constitue pas un danger en soi, mais le Centre de contrôle a récemment remarqué que son débit avait augmenté. Quelques mois auparavant, lors de sa sorite via le sas japonais, le robot-détecteur de fuites externes a indiqué sa localisation probable. Thomas tentera désormais d’identifier avec précision la source de la fuite. Il inspectera particulièrement les boîtes de jonction, les lignes rigides et les tuyaux du radiateur. Il prendra des photos et vérifiera au toucher ce qu’il observera. L’opération devrait durer 105 minutes.

La seconde tâche de Thomas, au niveau du segment S0 de la poutre de la Station, devrait s’étaler sur quatre heures. Il s’agira pour l’astronaute de l’ESA de procéder à l’entretien de l’extrémité du bras robotique canadien, consistant en deux parties : d’une part le Manipulateur agile spécialisé SPDM (Special Purpose Dexterous Manipulator), et d’autre part l’effecteur de verrouillage LEE (Latching End Effector). Thomas devra lubrifier le bout de ces systèmes afin de garantir le bon fonctionnement du bras robotique lors des opérations à venir.

The robotic arm's hand. Credits: ESA/NASA

La « main »du bras robotique canadien. Photo : ESA/NASA

Les tâches optionnelles

Les sorties dans l’espace, en plus d’être chronophage, sont très compliquées à organiser. Afin ‘en profiter au maximum, le Centre de contrôle prévoit donc toujours des tâches optionnelles à effectuer au cas où les opérations principales seraient terminées avant la fin du temps alloué à l’activité extravéhiculaire.

Les tâches optionnelles de cette sortie consisteraient notamment à installer des mains courantes, remplacer un éclairage et la protection d’un objectif de caméra.

Thomas in same white spacesuit holding onto handrail during his first spacewalk. Credits: Roscosmos

Thomas se tenant à une main courante durant sa première sortie dans l’espace (13/01/2017). Photo : Roscosmos

 

Retour à la Station

Toutes ces opérations devraient se dérouler en six heures et vingt minutes, sans pause pour manger ou aller aux toilettes. Les astronautes peuvent boire à la paille de l’eau grâce à une poche dédiée. La sortie est fatigante non seulement à cause de sa durée, mais également de la rigidité de la combinaison pressurisée dans le vide de l’espace. Une EVA (activité extravéhiculaire) demande de énormément de patience de la part des astronautes et de rester constamment attentif.

In the airlock. Credits: ESA/NASA

Dans le sas (01/2017). Photo : ESA/NASA

Tout au long de la sortie, ils procéderont régulièrement à des vérifications de leur scaphandre et particulièrement l’usure de leurs gants. La Station spatiale orbite autour de la Terre en 90 minutes, ce qui implique une alternance toutes les 45 minutes du jour et de la nuit. Shane et Thomas travailleront donc constamment 45 minutes à la lumière du soleil, puis 45 minutes dans l’obscurité totale. Les scaphandres sont équipés de lumières pour les phases nocturnes, mais lors du lever du jour les astronautes peuvent se retrouver éblouis quelques instants.  

Après 25 minutes à remettre de l’ordre et procéder à de nouvelles vérifications, le sas est remis sous pression au bout de cinq minutes environ. À l’intérieur, Peggy et Sergueï Ryzhikov se tiendront prêts pour accueillir Shane et Thomas et les aider à s’extirper de leur scaphandre.  

La sortie devrait se terminer aux alentours de 19 heures (heure de Paris).