Réalisé en collaboration avec le Parisien Magazine / Aujourd’hui-en-France Magazine

Cela fait plus d’un mois que j’ai débarqué dans la Station spatiale internationale. Et même si je réalise la chance que j’ai d’être perché là-haut, je suis conscient de ne pas être en vacances. Les agences spatiales comptent sur moi et sur mes collègues astronautes pour réaliser des dizaines d’expériences scientifques, faire avancer la recherche. Alors on ne chôme pas.

Le matin, le réveil sonne à 6 heures. Le soir, on arrête de travailler vers 19 h 30. Ensuite on dîne, on appelle nos familles, on envoie des mails… Très vite, il est 22 h 30, l’heure d’aller se coucher. Avec tout ça, diffcile de s’amuser à bord de l’ISS. Mais j’arrive à prendre quelques minutes par-ci, par-là pour me divertir. C’est essentiel pour recharger les batteries.

Space juggling

Comme on se balade souvent dans la Station, il y a un jeu que l’on fait tous : les cascades en impesanteur. Dès qu’il s’agit d’effectuer des pirouettes, de voler en arrière, je fonce. Il y a même une grande planche dans le laboratoire sur laquelle je m’amuse à faire des glissades. C’est très bête, mais ça nous fait tous rire. Après, on n’est pas non plus en colonie en vacances. Je n’oublie pas que Peggy Whitson a vingt ans de plus que moi, que Shane Kimbrough est colonel dans l’armée… Je ne vais pas m’amuser à cacher leurs slips pour faire une blague. C’est pour ça aussi que je n’ai pas encore osé jouer avec le ballon de rugby que j’ai apporté. Avec tous les équipements coûteux dans tous les coins, les câbles, les ordinateurs partout, je pense que ça agacerait le centre de contrôle. En attendant, je m’entraîne avec des pommes !

Fresh apples

Bien sûr, il y a des jeux plus calmes dans la Station. Avant de partir dans l’espace, j’ai demandé qu’on m’installe un jeu vidéo de basket-ball sur la tablette. Je pensais qu’ils oublieraient, mais non. Dès que j’ai quelques minutes, je marque des paniers. Il faut dire que le vrai basket-ball me manque déjà. Sur Terre, j’avais l’habitude d’y jouer très régulièrement.

Pour trouver des jeux dans l’ISS, ce n’est pas compliqué. Dans un coin, il y a une caisse avec marqué « toys » (« jouets » en français) dessus. Je n’ai pas encore regardé dedans, mais j’imagine qu’il y a des babioles pour rigoler. Sinon, nous avons tout un tas de pages de sudokus, de mots croisés… Rien de fou, mais ça suffit à nous changer les idées. Pour ma part, j’ai apporté un jeu de cartes. L’idée n’est pas tellement de jouer à la bataille ou au black jack, mais je veux montrer quelques tours de magie à mes collègues. C’est une passion un peu inavouable, je sais, mais j’assume. Dans ma valise, il y a aussi une paire de dés. Là aussi, ce n’est pas pour jouer avec – ce serait compliqué en impesanteur –, mais c’est une sorte de « totem ». Quand j’étais ado, j’avais acheté ces dés à Madagascar pour ne pas m’ennuyer en attendant les bus et les avions. Depuis, je les emmène partout pour me porter chance. C’est fou de se dire qu’ils seront allés dans l’espace.

En réalité, mon jeu préféré c’est d’observer la Terre. L’idée est d’essayer de deviner au-dessus de quels pays, océan ou ville nous sommes en train de passer. Tout est là, devant vous, il n’y a plus qu’à trouver. Mais malheureusement, je ne suis pas encore très fort. La dernière fois, j’ai même confondu Rome avec Lyon. Alors, imaginez quand je passe au-dessus du Tadjikistan ! L’avantage, c’est qu’au bout de mes six mois de mission, je connaîtrai sans doute chaque recoin de la planète par cœur.

Cities at Night