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Réalisé en collaboration avec le Parisien Magazine / Aujourd’hui-en-France Magazine

Il y a quelques semaines, j’ai passé les fêtes loin de ma famille pour la toute première fois de ma vie. C’était étrange… Car chez les Pesquet, Noël et le Jour de l’An, c’est important. C’est la seule et unique occasion dans l’année où l’on essaie de tous se retrouver pour partager un moment en

Photo: NASA/Peggy

Photo: NASA/Peggy

semble. Quand j’étais enfant, le point de ralliement était la ferme de mes grands-parents. Avec mes 21 cousins, on faisait les quatre cents coups. Je me souviens de batailles de boules de neige d’anthologie. Parfois, on s’offrait quelques glissades sur un lac gelé. C’était carrément interdit, mais on s’en fichait : ce n’était qu’une fois par an. Alors oui, forcément, même si j’ai adoré passer les fêtes à bord de la Station spatiale internationale, elles n’avaient pas la même saveur.

Le plus dur pour moi, cela a été de ne pas pouvoir serrer dans mes bras ma famille et ma compagne. J’ai quand même réussi à les joindre par téléphone et par vidéoconférence pour leur dire qu’ils me manquaient, que je pensais à eux tous les jours. La fameuse magie des fêtes est compliquée à ressentir dans l’espace. C’est un peu comme partir au soleil en décembre, on est déphasé. Ici, il n’y a pas de neige, il ne fait pas froid, nous ne sommes pas vraiment en vacances, et on ne peut pas se coucher tard à cause du travail. Et puis, il n’y a pas de champagne. L’alcool est interdit à bord parce que l’on doit avoir toute notre tête en cas d’urgence. Je vous avoue que c’est compliqué de s’émoustiller avec du jus d’orange et du thé.

Mais bon, malgré tout, avec mes collègues, nous avons essayé de faire en sorte que nos fêtes soient inoubliables. C’est important pour le moral d’un astronaute de garder des moments de détente. Alors oui, comme des enfants, nous avons cherché le petit sapin en plastique caché dans les recoins de l’ISS, histoire de décorer la station. Malheureusement, nous ne l’avons pas trouvé ! Alors vous savez ce qu’on a fait ? On a suspendu nos grosses chaussettes dans l’espoir que le Père Noël vienne y glisser quelques cadeaux, on a trouvé quelques chapeaux pointus rouges avec des pompons blancs et un disque de chants de Noël. Ça y est, la fête avait commencé. Le 24 décembre, vers 16 heures, nous nous étions lancés, mes collègues et moi, dans un concours de décoration de cookies avec du glaçage à l’américaine. Le mien n’était pas dingue. J’ai bien fait d’être astronaute plutôt qu’artiste. Mais bon, on a tous bien rigolé. D’autant qu’au même moment, Peggy et Shane avaient décidé de nous montrer le film Christmas Vacation – en français, Le Sapin a les boules –, une comédie de Noël très célèbre aux États-Unis.

Le soir, nous nous sommes préparé un vrai festin. Entre la purée de patate douce cuisinée par Peggy et les petits plats français que j’ai apportés de la part du chef étoilé Alain Ducasse, on s’est vraiment régalés. La soirée s’est poursuivie avec l’ouverture des petits cadeaux que l’on s’est offert entre nous. Pour ma part, j’avais apporté des chocolats et surtout des boules de Noël que ma compagne Anne avait customisées tout spécialement pour mes collègues. Enfin, nous avons terminé le réveillon devant le dernier Star Wars. Le lendemain, rien de fou non plus ! A part que la NASA m’a fait un énorme cadeau. Comme ils savent que je suis un grand fan de basket-ball, ils m’ont diffusé les matchs de championnat de l’après-midi quasiment en direct. On ne pouvait pas me faire plus plaisir.

Le Nouvel An s’est déroulé à peu près sur le même modèle. Bons plats, jeux, films… Nous n’avons pas eu de feu d’artifice, mais peu importe. Même pendant les fêtes, je n’oublie pas que je suis en mission, et que mon temps là-haut est compté. Pour l’instant, je me concentre sur le travail. Et je n’oublie pas de me reposer. Il faut tenir sur la longueur.

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